De la part de Barbara by Michel Dansel

Auteur:Michel Dansel [Dansel, Michel]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Policier
Éditeur: Librairie Arthème Fayard
Publié: 2014-04-24T04:00:00+00:00

Il était 1 heure de l’après-midi et le cimetière Montparnasse était presque désert. Encore trop tôt pour les mamans du quartier qui viennent faire prendre l’air à leur progéniture. Quant aux amateurs de solitude, couples d’amoureux ou vieux messieurs pensifs, ils trouvaient peut-être qu’en ce jeudi d’avril, le jardin du Luxembourg offrait des frondaisons plus accueillantes.

Près du vieux moulin couvert de lierre qui, dans la section la plus grande du cimetière, domine un petit tertre, un homme encore jeune, vêtu d’une chemise kaki un peu sale et froissée, le visage visiblement fatigué, avec une légère barbe qui ombrait ses joues, remontait d’un pas lent l’allée de cyprès. Il s’arrêta au pied d’une tombe massive en marbre gris et jeta un regard autour de lui, l’air un peu désorienté.

A quelques mètres, une petite fille jouait en chantonnant, tout absorbée par le soin qu’elle mettait à donner à manger à sa poupée. Un couple de personnes âgées, non loin de là, s’affairait à nettoyer une tombe :

« Tu t’amuses bien, Céline ? demanda la dame en se redressant, une poignée de fleurs séchées dans la main.

— Oui, mamie », répondit sagement la petite fille, en levant la tête vers l’homme jeune à la chemise kaki, qui ne la quittait pas des yeux.

Ce dernier lui sourit et s’assit sur le rebord de la sépulture grise. Il se sentait fatigué et nerveux. Depuis une semaine qu’il allait de comptoir de bar en arrière-salle de café, il avait ressenti le besoin de se reposer dans un endroit calme et aéré. Il se savait toujours l’objet d’une traque insistante, dont il devinait les multiples mobiles. De sa besace de toile, il sortit une orange.

Jean-François Sabourin, gardien de la paix de son état, avait son jour de repos le jeudi. Le cimetière Montparnasse n’était pas son lieu de promenade favori, mais il lui sembla que le chemin le plus court entre l’avenue du Maine, où il venait de choisir une magnifique perceuse électrique, et le boulevard Edgar-Quinet, où il voulait acheter du papier de verre et de la peinture dans un magasin spécialisé, consistait bien à traverser cette prestigieuse nécropole.

Il passa rapidement devant un jeune homme assis au pied d’une tombe. A peine l’avait-il dépassé qu’il s’arrêta presque, puis il reprit une démarche accélérée et se mit à courir à toute vitesse vers la sortie la plus proche.

Il venait de reconnaître sans nul doute possible l’homme dont son cousin Albajara, de la brigade criminelle, lui avait montré la photo en lui racontant en gros l’affaire. Heureusement, la cabine téléphonique à l’angle du boulevard Raspail était libre « Allô ? Albajara est là ? » demanda-t-il précipitamment lorsque le standard l’eut branché sur le bureau de la Criminelle dont son cousin lui avait donné le numéro de poste.

« Deux secondes ! entendit-il. Je crois qu’il est encore dans le service.

— J’ai ton clown, mon cher Alba ! lui lança-t-il quand il reconnut son cousin essoufflé au bout du fil. Il est en train de casser la croûte dans le cimetière Montparnasse.

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